Ici et maintenant. [Contexte]

Admin Messages : 52 Date d'inscription : 02/06/2017

La Valse des Siècles

Jours et nuits se succédèrent en une danse sublime. Que la famine assaille les estomacs ou que la joie perce les coeurs, les siècles s'écoulèrent avec indifférence. Au fil du temps, les préoccupations des êtres de l'Ancien Monde ne changèrent guère. La tribu de Myzra s'empara d'un territoire, le royaume d'Hakilase. Lorsqu'ils découvrirent le lieu qui abriterait leur refuge, ils se nommèrent Enfants de l'Olympe, en hommage à d'étranges souvenirs que certains manifestaient. Davantage éprise de liberté, la tribu d'Eshybes finit néanmoins par s'installer dans le Royaume de Loukana. Fascinés par le ciel, les plus jeunes s'imaginèrent qu'ils étaient les Enfants du Soleil, et en grandissant, l'idée s'enracina profondément en eux. Au détriment de la religion, la priorité des hommes devint la construction de cités. Une épidémie virulente s'ensuivit, emportant inexplicablement les enfants. En dépit de leurs désaccords, chaque peuple choisit alors un représentant d'Orphée, un être qui leur servirait de guide et les aiderait à suivre les préceptes de la divinité. Détenteurs d'un savoir mystique, la légende raconte que, par leurs conseils et leurs hommages, les Grands Prêtres empêchèrent la venue de multiples catastrophes.

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Tandis qu'une nouvelle civilisation jaillissait des efforts communs, Orphée, rendu amer par la solitude, exigea une compagnie. De sa grâce, il toucha quelques individus, dont la puissance s'éveilla sans crier gare. Jusque-là dépourvus de pouvoir, des Enfants de Prométhée et des Enfants de Pharaon acquirent un don sans précédent. L'avènement des dieux occasionna de vifs chamboulements dans la vie de tous. Réservées à leur sauveur, les prières se tournèrent peu à peu vers ces êtres de chair et de sang qui, vivant à leurs côtés, pouvaient enchanter leur quotidien ou le changer en cauchemar. Porteurs d'une magie unique et adulés par la foule, les Dieux Majeurs devinrent immatériels. Craignant que les coeurs ne se détournent de la divinité originelle, les Grands Prêtres l'honorèrent d'une nouvelle coutume : parmi les êtres de l'Ancien Monde, deux individus furent choisis pour offrir un enfant. L'année suivante, ils reçurent la joie du sacrifice, et l'enfant se consacra tout entier à la gloire d'Orphée.

Entourés par les dieux et sans cesse bénis, les hommes se piquèrent d'orgueil. Les peuples se renfermèrent sur eux-mêmes, chacun espérant en secret attirer les faveurs du Sauveur. Des têtes couronnées ne tardèrent pas à prendre la place qui leur revenait, et si la religion conservait une place de choix, la culture se développa peu à peu. De spectaculaires inventions permirent aux villages de se transformer en cités à l'élégance brute. Chacun agissait de son mieux pour contribuer au prestige des siens. Bien que la cohabitation soit quelquefois houleuse, la volonté de construire une civilisation plus attrayante que celle de l'ennemi l'emportait sur les querelles internes. Un conflit éclata cependant lorsqu'une Stryge profana le tombeau d'Eshybes pour en détruire les ossements. Officiellement condamnée par ses congénères, dont certains admiraient néanmoins l'audace, elle fut la première à être exilée. Brutale et inattendue, la sentence ne suffit pas à calmer les esprits. La colère toujours de mise, les affrontements reprirent de plus belle. Tout étranger surpris sur le territoire de l'autre risquait de voir sa tête en marquer la frontière.

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Une découverte impromptue ébranla cependant la tradition des hostilités. Un territoire inconnu s'offrit aux explorateurs, et bien que chaque peuple voulut s'en attribuer le mérite, tous ne tardèrent pas à déchanter. L'horreur se cachait derrière la beauté. De monstrueuses créatures sévissaient en ces lieux, et leur puissance dépassait toutes les rancoeurs. Bien davantage que l'ennemi ancestral, les Ravageurs représentaient une menace considérable pour les êtres de l'Ancien Monde. Sans comprendre ce qu'ils étaient, ils s'attaquaient à quiconque pénétrait sur leur territoire. Si certains avaient le malheur d'être possédés, d'autres succombaient sous leurs doigts squelettiques. Aucune arme conventionnelle ne permettait de les renvoyer vers l'Au-Delà, et les hommes finirent par imaginer que rien ne pouvait venir à bout des spectres. Ainsi, malgré le désir ardent d'en découdre des Stryges et des Chimères, les rois et reines s'accordèrent pour mettre la guerre en suspens. Une trêve fragile que le moindre incident pourrait balayer. Contre toute attente, les Exilés commencèrent également à faire preuve de témérité, n'hésitant plus à mener des incursions sur les territoires auxquels ils avaient autrefois appartenu.